Nous travaillons dans l’ombre et sans cette ombre point de lumière. Ce que nous faisons ne se voit guère mais ce que nous ne faisons pas se voit. La chambre que découvre le retraitant est propre, les draps et serviettes sont sur le lit, les sanitaires sentent bon et cela paraît tellement naturel que l’on en oublie qu’il y a des petites mains dans l’ombre qui oeuvrent à ce bien être. Que l’on ne réalise pas toujours la course contre la montre lorsqu’un groupe de retraitants s’en va et que le soir même un nouveau groupe arrive et qu’il n’est pas rare de devoir nettoyer 30 chambres dans la journée. Le linge sale est à trier et à compter, le linge propre est à répartir sur les étages et leur poids rend totalement inutile l’adhésion à la salle de musculation.
Puis les petites mains s’en vont côté cuisine : plonge, propreté des salles à manger, table mise… Elles comptent et recomptent le nombre de couverts pour se rendre compte finalement qu’il en manque ou qu’il y en a en trop, parce que l’un n’est pas inscrit, l’autre n’est pas arrivé, un troisième sort d’on ne sait où… Bref, le compte y est rarement et il faut alors modifier la composition des plats, rajouter ou répartir autrement pour que chaque retraitant ait de quoi se sustenter.
Et ces petites de l’ombre ont parfois des fou-rires qui résonnent dans ce lieu de silence religieux et qui contribuent à donner une note de gaîté indispensable dans un quotidien parfois musclé. Et parfois même, ces petites mains composent des bouquets de fleurs et donnent ainsi à voir leurs capacités créatrices et artistiques.
Et au-delà des gestes du quotidien il y a des rencontres, les au revoir au bord des larmes avec les jeunes migrants l’été dernier, une personne de la retraite soleil qui nous raconte, les yeux brillants de bonheur, la balade qu’elle vient de faire, une retraitante qui nous demande notre prénom avant d’aller à la messe et parce qu’elle souhaite prier pour notre bonheur ! ou simplement les petits mots gentils qu’on nous laisse parfois en remerciements. Il y a aussi des conversations à bâton rompu où des retraitants nous questionnent sur notre parcours privé et personnel et qui découvrent soudain le sens et la force du mot « oser »… C’est très gratifiant, dans ces moments-là, non seulement d’être des petites mains mais de sentir aussi vibrer nos coeurs et ca fait du bien .. Et, bien sûr, il y a les repas en silence où notre seul mode de communication est le sourire.
Nous donnons et nous recevons… Dans un paysage qui donne aussi…
La liste est longue de tout ce qu’elles font dans l’ombre mais il est clair que sans ces petites mains de Penboc’h la lumière ne serait pas.
Kelly, Ludivine, Solenn
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